Le pitch : Après son décès accidentel, Eleanor se retrouve dans l’au-delà. Fort heureusement pour elle, ses bonnes actions cumulées lors de son existence lui valent d’être accueillie au “bon endroit”, un quartier créé par l’architecte Michael où seules les personnes ayant mené les existences les plus vertueuses ont droit de cité. Le seul problème, c’est qu’Eleanor était une parfaite connasse de son vivant et qu’il y a visiblement eu une erreur de casting.

Michael l’architecte

The Good Place est une série créée par Michael Schur, qui a débuté comme scénariste sur le Saturday Night Live et The Office (US), il a aussi co-signé avec Rashida Jones un épisode de Black Mirror (Nosedive/Chute Libre), mais qui s’est surtout fait un nom en tant que créateur des séries instantanément cultes Parks and Recreation (2009-2015) et Brooklyn 99 (2013-2021).
Parmi les points qui caractérisent son travail, on notera un humour bon enfant (mais qui tape régulièrement et gentiment en-dessous de la ceinture), faussement innocent et d’apparence superficiel qui va souvent en réalité cacher une profondeur, parfois mordante, parfois revendicative, et toujours incroyablement humaine parsemée de coups d’éclats épiques et touchants. The Good Place y ajoute un univers aux règles complexes et parfaitement huilées, des qualités qui, mises bout à bout, rappelleront beaucoup Dan Harmon (Community, Rick & Morty),
Mais ce qui attachera plus que tout dans les univers de Michael Schur, ce sera la qualité de ses personnages, généralement des stéréotypes qu’il prend plaisir à détourner et à cribler de failles et défauts pour leur donner de la substance et les rendre terriblement attachants tout en préservant une cohérence à toute épreuve.

Installez-vous confortablement, on va vous baiser le cerveau

Un casting (presque) sans faille

Parce que si les personnages sont faciles à appréhender, voire un tantinet décevants de prime abord, chacun bénéficie petit à petit de sa propre profondeur qui rendra le plus insignifiant des seconds rôles aussi attachant que le reste du cast.
Chacun aura son heure de gloire, même le dernier faire-valoir du groupe, et c’est même dans ces moments que ses séries sont les plus humaines et positives, tout en dosant gracieusement une dose de cruauté et de cynisme dans les moments les plus émotifs pour rendre l’ensemble digeste pour les plus allergiques aux bons sentiments.

Schur aime les gens vrais et le fait incarner par les bonnes personnes. Il a révélé des talents comme Chris Pratt (Parks & Rec, Jurassic World, Guardians of the Galaxy), Aubrey Plaza (Parks & Rec, Scott Pilgrim), ou su utiliser avec brio des talents dans des rôles inattendus (Ted Danson, Rob Lowe, etc.) et chacun d’entre eux le lui rend en délivrant une prestation impeccable (enfin presque tous).
Dans The Good Place nous suivons principalement les interactions de deux “couples” (imposés par les règles du bon endroit qui unit d’office deux âmes soeurs) : Eleanor (Kristen Bell) et Chidi (William Jackson Harper), un prof de philosophie spécialisé dans l’éthique, et leurs “voisins” Tahani (Jameela Jamil), une richissime organisatrice d’œuvres de charité et Jason (Manny Jacinto, peu convaincant), un moins bouddhiste qui a fait vœu de silence. À ce quatuor il faut ajouter Michael (Ted Danson), l’architecte du quartier, et de son assistante Janet (D’Arcy Carden).
Quelques têtes familières des séries de Schur font des apparitions avec un plaisir apparent et partagé, notablement Adam Scott, Jason Mantzoukas (dont le répertoire semble se limiter au même personnage de Brooklyn 99 à John Wick Parabellum) ou encore Marc Evan Jackson. Et c’est un plaisir renouvelé de voir cette galerie de personnage évoluer dans l’univers barré de The Good Place.

Nos deux couples aussi teubés que la série est intelligente

Un univers bien huilé

L’autre grande force de The Good Place, c’est surtout le rythme avec lequel les informations sont délivrées, les cliffhangers de fin d’épisode sont légion tout en restant efficaces. Mais c’est surtout la facilité avec laquelle la série se renouvelle après chaque révélation de fin de saison qui impressionne.
Si parfois la série use d’artifices un peu faciles et d’effets spéciaux dispensables dans ses débuts, ou de situations un poil forcées, elle finit toujours par récompenser le spectateur avec des solutions cohérentes à apparentes impasses et réutiliser les éléments le plus incongrus précédemment installés pour leur donner du sens et un rôle conséquent.
On appréciera les efforts déployés pour complexifier les situations et les résoudre avec brio. La série est une œuvre maniaque, complexe, prétexte à des situations absurdes, des blagues potaches, des considérations philosophiques et introspectives. C’est un joyeux bordel, un train sans freins qui déraille en permanence pour retrouver son chemin comme par miracle au moment où on se croyait perdu.

Si la première saison avait quand même un peu peiné à me convaincre, le simple fait qu’il en existe 3 autres qui arrivent à se renouveler sans essouffler le concept est une prouesse en soi, et non content de ne pas faiblir, la série tient certains de ses meilleurs épisodes dans ses moments les plus tardifs. Si elle est difficile à binge-watcher, de par certains aspects un poil redondants, elle se laissera revoir sans difficulté.

En résumé si vous cherchez une série fraîche, qui saura satisfaire un public très large, avec une dose d’humour qui passe sans s’effaroucher du touchant au cinglant tout en proposant une intrigue gratifiante, vous êtes au bon endroit.